Toute entreprise a pour but de grandir et de prospérer. Pour cela, il faut les bonnes personnes aux bons postes. En France, la règle tacite veut que l’on récompense les bons états de service d’un collaborateur par une promotion… Promotion qui se traduit presque toujours par du management.

Louable intention que la récompense de la loyauté et de l’efficacité. En théorie, l’ego du collaborateur est flatté, le paternalisme des dirigeants également. Et en pratique ? Evidemment, c’est tout le contraire qui se produit. Le collaborateur promu se retrouve noyé sous les responsabilités, le dirigeant ne reconnait plus son petit protégé qui n’assure plus autant qu’avant.

Comment est-ce possible ? Très souvent, une accumulation d’erreurs tout au long du processus de promotion. Voici les principales, et surtout, comment les éviter afin que cette promotion soit un cadeau et non plus un fardeau.

 

Les erreurs structurelles

#1 – Le management est la seule voie de progression envisageable dans votre structure

Constat :

Bien trop souvent, la seule façon de progresser au sein d’une entreprise consiste à prendre la gestion d’une équipe. Culturellement, un changement de poste sans nouvelles fonctions managériales est perçu comme une « mise au placard », ce qui est absurde. La direction confie des responsabilités managériales à des personnes disposant d’une expertise métier indéniable (et indispensable) mais qui peuvent se révéler être de piètres managers. 

 Mon conseil :

Quand la taille de l’entreprise le permet, il peut s’avérer judicieux de proposer des trajets de carrière divers : un trajet managérial, un trajet d’expertise, un trajet de transversalité (qui réjouira les multi-potentiels qui souffrent des cases dans lesquelles ils sont rangés et dont ils ne peuvent quasiment pas sortir) Chacun y trouvera son compte et sera valorisé, sans pour autant se voir confier des responsabilités managériales si cela n’est pas dans ses appétences professionnelles.

 

#2 – Les fausses responsabilités

Constat :

Très souvent, ce sont des collaborateurs que l’on a nommés « coordinateurs » ou « adjoints » mais qui ne disposent pas d’une véritable autorité. Il y a différentes raisons à cela, parmi lesquelles : leur manager ne les estime pas assez mûrs, il ne veut pas céder une partie de sa propre autorité et de son pouvoir, il ne veut pas augmenter le salaire de ce collaborateur promu.

Le résultat est souvent catastrophique : ces coordinateurs, ou adjoints ne sont pas pris au sérieux, et davantage perçus comme des « Gentils Organisateurs », « larbins du big boss » et sont généralement court-circuités au bout de quelques mois. Ces situations sont très démotivantes et frustrantes.

 Mon conseil :

Le collaborateur promu doit avoir de vraies nouvelles responsabilités : une équipe assignée, un budget, un pouvoir de décision, des projets spécifiques qu’il gère de manière autonome…

Il convient également d’éviter le flou et les demi-mesures du style « tu peux communiquer la stratégie de l’équipe, mais pas prendre part à sa conception. », qui le cantonne à un rôle de porte-parole, qui deviendra bouc émissaire en cas de décisions impopulaires.

 

Les erreurs de communication et d’accompagnement

#3 – Une mauvaise communication auprès de l’équipe

Constat :

Confier des responsabilités managériales à un membre d’une équipe peut être source d’inquiétude pour l’ensemble de l’entreprise : les collaborateurs peuvent mal réagir et douter de la légitimité de l’heureux(se) élu(e) (ancienneté, compétences, diplômes… sans parler de l’égo parfois déçu de ceux qui auraient aimé être promus).

Souvent dans ce cas, la politique de la Direction se résume… à faire l’autruche. Annonce par mail envoyé tardivement, pas de réunion d’équipe ni autre événement autour de cette promotion. En toute logique, sans annonce officielle, pas de réaction officielle, et l’on peut s’attendre à ce que l’équipe ne joue pas le jeu, voire mette des bâtons dans les roues du nouveau manager… Ambiance garantie !

Mon conseil :

L’annonce d’une promotion au sein d’une équipe est un exercice délicat, mais ce n’est pas une raison pour le fuir. Vous avez fait ce choix, vous devez l’assumer ! Sinon, cela revient à dire que le nouveau manager a été « parachuté ». Avant même de commencer, il part avec un déficit de confiance qu’il lui sera quasiment impossible à rattraper.

Une annonce assertive et officielle de cette promotion, idéalement suivie d’un moment convivial (petit-déjeuner ou déjeuner) permettra d’asseoir l’autorité du manager et de créer un moment d’échange transparent qui sera apprécié des collaborateurs.

 

#4 – L’absence d’accompagnement à la prise de fonction

Constat :

La prise de nouvelles responsabilités se résume parfois à ceci : « Tu prends la responsabilité de l’équipe et on fait le point dans six mois ». Il n’y a pas de réel entretien lors de la prise de fonction et le directeur n’a jamais clairement spécifié à son manager ce qu’il attendait de lui. Durant cette période de « rôdage », aucun feedback n’est donné. Le nouveau manager peut alors légitimement se demander s’il est sur la bonne voie, ce qu’il doit améliorer… Cela revient à conduire sur autoroute, la nuit, par temps de brouillard et sans éclairage. Dangereux, non ?

Mon conseil :

Le manager doit avoir une feuille de route claire avec des objectifs précis et détaillés, c’est le minimum. Le manager du manager doit également lui spécifier ce qu’il attend de lui : son rôle, ses nouvelles missions et aussi celles qui disparaissent du fait de cette promotion. Il doit également lui faire part de ses attentes en termes d’attitude et calibrer le reporting qui doit lui être fait. Il est nécessaire d’encourager et de valoriser toute action satisfaisante et de maîtriser l’art du feedback en cas de correctif à apporter.

Enfin, il est parfois bon de faire appel à un coach spécialisé en prise de fonction. Rompu à l’exercice et extérieur à l’entreprise, son accompagnement est souvent très précieux pour le nouveau manager.

 

Les erreurs de management

#5 – L’absence de formation ou de toute expérience managériale

Constat :

Bien trop souvent, la stratégie mise en place pour accompagner un manager fraîchement promu se résume à un partage d’expérience, une « passation de relais » des anciens.

Cette phase d’apprentissage plus ou moins longue est surtout très risquée. En effet, en apprenant son nouveau métier de manager, le collaborateur influence le travail de toute une équipe, et les anciens ne sont pas forcément au fait des nouvelles pratiques managériales, sans oublier que ce qui marche peut-être pour eux ne marchera pas forcément pour le nouveau manager. Ces tâtonnements peuvent avoir de lourdes conséquences, et potentiellement provoquer des départs.

Mon conseil :

Au lieu d’agir pour guérir un malaise, il convient d’évaluer l’expérience managériale de votre collaborateur et de l’accompagner, par du coaching ou de la formation en management axée sur les éléments manquants à ses compétences afin qu’il soit opérationnel dès ses premiers pas.

Investir du temps (quelques jours) et un peu d’argent peut sembler superflu dans l’immédiat, mais à long terme, tout le monde est gagnant.

 

#6 – Des engagements oubliés ou non tenus

Constat :

Les managers nouvellement promus doivent faire leurs preuves, et si celles-ci sont concluantes, on promet alors une augmentation de salaire, ou une prime, afin de récompenser les efforts, et maintenir la motivation. Cela se résume souvent à une phrase de ce type « On se donne 6 mois, et si tout roule, ton salaire sera réajusté, ainsi que les primes sur objectifs. » Le manager se décarcasse comme un beau diable, fait parfois des sacrifices, ressent une pression certaine… et s’inquiète légitimement de savoir où il en est. Et l’information ne vient pas d’elle-même. Il est obligé d’aller la chercher ; avec la boule au ventre, il faut bien le dire.

Mon conseil :

Si vous avez pris des engagements (en termes de délai, de feedback ou autre), tenez-les ! Vous devez impérativement revenir vers votre nouveau manager avant que celui-ci n’ait à le faire. Si vous avez décidé de confier des responsabilités supplémentaires à un de vos collaborateurs, vous devez accepter de le rémunérer en conséquence.

 

#7 – La sélection sur les compétences techniques

Constat :

Les bons éléments sont souvent récompensés par des primes… ou des missions de management d’équipe. Or, le meilleur technicien ou le meilleur commercial de l’équipe ne sera forcément le meilleur manager.

Devenir un « bon » manager nécessite d’apprendre à définir et transmettre sa vision, motiver ses équipes et la faire grandir. Pour cela, il lui faut développer des nombreuses compétences (souvent appelées « soft-skills ») qui n’ont absolument rien à voir avec celles qui ont fait de lui un excellent collaborateur. Il doit aussi apprendre à lâcher prise sur les compétences techniques, qui sont de moins en moins dans ses missions, davantage tournées vers la gestion et l’accompagnement des équipes, des projets et l’atteinte des objectifs

 Mon conseil :

La promotion par le management doit se faire sur les compétences autres que celles techniques. Tout simplement car si vous mettez votre meilleur commercial à la tête de son équipe, qui va réaliser ses merveilleuses performances ?

Recherchez plutôt, parmi vos collaborateurs, ceux qui ont un potentiel fédérateur et communiquant, une capacité à faire grandir leur entourage, qui souhaitent transmettre avant tout.

 

En conclusion…

J’entends souvent que c’est « l’intention qui compte », et comme je le constate quotidiennement en accompagnant des entreprises et des managers, une bonne intention, si elle n’est pas suivie de bonnes actions, reste vaine. La promotion par le management est certes une récompense, mais elle doit surtout être perçue comme une intention de faire grandir un collaborateur et suivie d’actions concrètes qui permettront à toutes les personnes impliquées d’être gagnantes.