Nous sommes la somme de nos choix. Et ces choix, nous les faisons de manière plus ou moins réfléchie, intuitive, ou sous une pression quelconque. Dans la vie comme au travail, il est parfois difficile d’opter pour telle ou telle solution, ou de dire « Non » à une demande qui nous est faite.

Autant refuser de donner un bonbon à son enfant de 4 ans à 19h paraît simple (encore que…), autant refuser de relire une présentation de 80 slides un jeudi à 18h30 pour le lendemain 8h peut sembler plus difficile à refuser.

Et quand on est bienveillant ça devient encore plus compliqué. On a souvent la sensation d’être tiraillé. On a peur de passer pour un « mauvais » collaborateur si on refuse. Et on se dit qu’on sera un mauvais parent si on rate le coucher des enfants ou un mauvais conjoint que l’on laisse notre moitié gérer seul(e) le diner alors que lui ou elle aussi a une charge de travail importante.

Alors comment on fait pour prendre une bonne décision ? Tamisage à travers 4 filtres pour donner une réponse éclairée,  juste et bienveillante pour tout le monde.

 

#1. Filtre de la curiosité

Avant de pouvoir prendre une décision, quelle qu’elle soit, il est utile de savoir de quoi on parle. Il vous faut donc poser toutes les questions qui vous semblent importantes, et surtout, obtenir des réponses !!

Imaginez qu’un collègue vienne vous voir : « Salut, tu pourrais nous donner un coup de main sur notre nouveau projet qui démarre la semaine prochaine, on est un peu short en termes de timing… »

Vous avez évidemment besoin d’en savoir plus avant de dire oui ou non. Alors demandez !! Quel délai, quel genre de coup de main (avis consultatif ou réelle implication), qui travaille sur ce projet, ce qu’on attend de vous exactement.

On dit que la curiosité est un vilain défaut et bien non, c’est même l’une des plus belles qualités de la bienveillance. En posant ces questions, vous montrez que vous vous intéressez à la personne qui vous sollicite et au projet dont elle vous parle.

Les seules questions stupides seront celles que vous n’aurez pas posées et qui resteront sans réponse. Cela peut fausser votre capacité de discernement et surtout influer sur votre décision finale. Décision sur laquelle il sera ensuite difficile voire impossible de revenir, surtout si elle est positive et que l’on compte sur vous.

 

#2. Filtre de la compétence

Ce point est fondamental. En général, on vous demande votre aide car on estime que vous avez les compétences pour faire ce qu’on attend de vous. Est-ce réellement le cas ?

Ce n’est pas parce que vous êtes informaticien et que vous avez monté votre PC que vous êtes en mesure de créer et sécuriser l’architecture réseau de la start up de votre vieux pote de fac ou de créer une appli mobile de A à Z. De même, êtes-vous capable de réaliser un gâteau de mariage pour 150 personnes parce que vous avez fait une jolie déco pour celui de votre petite de 6 ans le mois dernier ? Il y a fort à parier que non. Les gens ne connaissent pas vos compétences réelles, ils ont besoin d’aide et savent vaguement que vous travaillez dans ce domaine. Le fameux « Toi qui es dans la com’/dans l’informatique », ça vous parle ?

Il vous appartient de creuser la question. En ayant bien posé toutes les questions nécessaires en 1, vous devriez normalement avoir rapidement la réponse à cette question…. A condition d’être honnête et objectif avec vous-même !!

Vous maîtrisez la communication institutionnelle et êtes bilingue. Un collègue vous demande de l’aide pour un salon à Las Vegas. Sacré challenge et joli voyage en perspective. Ceci étant, êtes-vous  la personne la plus compétente pour assurer 3 jours de présence sur un salon orienté BtoB, la cible étant des neurochirurgiens ayant mis au point une nouvelle méthode d’opération non invasive des anévrismes? Plus vous aurez eu de précisions, plus vous serez en mesure d’évaluer votre valeur ajoutée réelle sur cette mission.

Si vous n’avez pas les compétences requises, malgré tout l’intérêt que le projet peut avoir, il est plus sage et surtout plus professionnel de refuser. Vous pourriez mettre ce projet en péril, ou le retarder. Je vous rappelle qu’on cherche de l’aide, pas un stagiaire à former et à qui il faut tout expliquer.

Ce refus sera peut-être mal vécu par votre interlocuteur sur le moment, mais nul doute qu’il préfère avoir une personne compétente pour l’aider qu’un « boulet » pour le ralentir.

(Comme je suis de bonne humeur,  je vous fais grâce de la piètre image que certains auront de vous et qu’ils ne manqueront pas de rapporter si votre incompétence est découverte.)

 

#3. Filtre de la disponibilité

Vous avez toutes les compétences requises pour prêter main forte et on vous sollicite justement. Il y a de quoi être flatté. La tentation de répondre par l’affirmative est très grande. Vous avez enfin un peu de reconnaissance pour ces talents qui n’étaient pas utilisés !

Vient alors la question de la faisabilité en termes pratiques et organisationnels.

Ce projet vous intéresse et vous avez les capacités pour participer à sa réussite. Cela implique de faire 2h de plus toutes les semaines sur le mois à venir. Est-ce jouable ? Le temps n’étant pas élastique, qu’allez-vous sacrifier 2h par semaine ? Votre sport ? Le coucher des enfants 2 soirs par semaine ? Votre soirée entre potes ?

Une fois établi ce qui va être remplacé par le projet, posez-vous la question : est-ce que ça vaut le coup ? (et le coût aussi…) Vous devez être au clair sur ce qui va passer à la trappe au profit de cette mission, cela vous évitera de râler de ne pas pouvoir aller au sport, ou d’essuyer plus sereinement les reproches de vos potes qui ne vous ont pas vu(e) depuis longtemps.

Si vous n’êtes pas absolument certain de pouvoir vraiment donner 2h de votre planning toutes les semaines pendant 1 mois pour aider votre collègue, faites le lui savoir, tout simplement. Il ou elle pourra alors trouver une autre solution, comme réduire votre mission ou prendre en charge une partie des tâches à accomplir.

#4. Filtre de l’envie

Le projet est intéressant, vous êtes compétent et disponible pour apporter votre aide. Est-ce suffisant pour dire oui ? Non.

N’aidez que si vous en avez vraiment envie.

Si vous le faites sans réelle envie, mais parce que vous vous sentez obligé(e), il y a fort à parier que tôt ou tard, cela vous pèsera, tant dans l’agenda que sur le moral. Pour peu qu’entre-temps vous ayez 2 ou 3 imprévus, et vous pourriez même éprouver une certaine réticence, voire de l’hostilité face à ce projet auquel vous avez décidé de participer.

Si l’idée de ce projet tel qu’il vous est présenté ne vous emballe pas plus que ça, à quoi bon y participer ? Il est plus judicieux de concentrer et diriger votre énergie sur ce qui vous nourrit et vous épanouit, en dehors de ce qui vous incombe déjà. Vous connaissez le proverbe « A chaque jour suffit sa peine ».

 

Conclusion

Vous le constatez, répondre à une demande par un « non » selon cette méthode vous permet d’être au clair avec vous-même, et de pouvoir éventuellement défendre votre position si votre interlocuteur insiste. Dire « non » à autrui revient alors à vous dire « oui » à vous-même.

Si vous n’avez pas un OUI franc et massif aux questions 2, 3 et 4, c’est que… soit vous n’avez pas bien respecté la première étape (et donc votre décision ne sera pas forcément très éclairée, mais vous pouvez retourner à la pêche aux informations manquantes), soit que vous devez répondre à cette demande par un NON.

En effet, accepter alors que tous les signaux ne sont pas au vert risque de vous précipiter… dans la zone rouge. Sans envie, pas de réelle implication ; sans compétences, une marche lente ; sans disponibilité réelle, un sacrifice de temps au détriment de choses qui peut-être, vous tiennent à cœur.

Attention cependant à ne pas tomber dans la justification ou la surenchère pour expliquer votre refus. Il y a une différence entre « Je ne peux pas t’aider sur ce coup car je ne maîtrise pas suffisamment excel pour les besoins que tu as » et « désolée, je suis nulle en excel, en plus ma nounou n’est pas disponible et mon mari va me faire une scène si je le plante ».

Comme toujours, s’appuyer sur des faits concrets vous permet de donner une explication rationnelle sans basculer dans l’émotionnel voire le misérabilisme, autant de « failles » dans lesquelles votre interlocuteur pourra se glisser pour tenter de vous faire changer d’avis.

Enfin, vous remarquerez que vous n’aurez jamais à expliquer votre acceptation, donc encore une fois, vous n’êtes pas obligé de motiver votre refus. Un simple « C’est impossible, mais merci d’avoir pensé à moi. » peut être une réponse suffisante.