Les entreprises l’ont globalement compris, la QVT est un sujet incontournable depuis quelques années. Critère de plus en plus important, et surtout auprès des jeunes générations, la mise en place d’une démarche QVT par un potentiel employeur devient un élément d’acceptation d’une offre d’emploi, au même titre que le salaire ou d’autres avantages. Lorsqu’on quitte un emploi, on ne quitte pas forcément son métier, mais bel et bien des conditions d’exercice de ce métier (management néfaste, lieu de travail trop éloigné, travail peu valorisé).

Pour autant, la mise en place d’une démarche QVT peut sembler lourde, fastidieuse et complexe, et certaines entreprises, au-delà de la peur d’un coût pharaonique (peur irrationnelle, la QVT peut être efficace sans être ruineuse, mais c’est un autre sujet), n’ont pas l’énergie et les ressources humaines pour la mettre en place.

Ceci étant, sans attendre une décision politique ou une impulsion extérieure, chacun peut contribuer à améliorer sa Qualité de Vie au Travail, grâce à quelques astuces toutes simples.

 

#1 – Agir plutôt que subir

Tout le monde n’a pas la chance de travailler dans une entreprise engagée dans une démarche globale de QVT, mais cela ne signifie pas que vous devez assimiler votre job au travail des mineurs au XIXe siècle. Ce n’est pas parce que la Direction ne fait rien que vous êtes figé(e) dans une dalle de béton.

Vous pouvez agir à votre niveau, soit en réorientant votre mobilier pour faire face à la lumière, soit en créant un petit espace qui vous sera familier et accueillant si vous travaillez en open space. Peu de risque qu’on vous interdise une petite plante verte ou un pot à crayon en forme de licorne à paillettes offert par vos enfants.

Le mur est gris et terne ? Rien ne vous interdit d’y coller une affiche avec une citation qui vous inspire ou vous motive, un paysage qui vous ressource.

Si votre chaise n’est pas confortable, rien ne vous empêche d’investir dans un ballon de grossesse (12€) qui soulagera vos lombaires et fera travailler vos abdos tout en rédigeant vos mails. Vous serez probablement regardé de travers au début, puis petit à petit, certains curieux voudront essayer, et quelques-uns finiront par vous imiter.

Parfois, le changement doit s’opérer par petites touches, qui multipliées çà et là, feront réfléchir, et qui sait, agir, la Direction de votre entreprise.

 

#2 – Faire le tri

Bien souvent, qu’il s’agisse d’amis ou de nourriture, on préfère la qualité à la quantité. Cela donne de la valeur et de la saveur à ces aspects de notre vie. Pourquoi en serait-il autrement lorsqu’il s’agit de la vie au travail ? Le tri s’impose pour privilégier la qualité à la quantité.

 

Dans les mails

A part flatter votre égo, vous épuiser et augmenter la pression, recevoir 800 mails par jour ne vous rendra certainement pas plus efficace ni efficient. 75% de ces mails vous sont inutiles.

Ils sont même une forme de pollution intellectuelle, vous encombrent plus qu’autre chose. Cette overdose d’informations et de sollicitations, que vous vous sentez obligé de traiter, sont le premier pas vers le burn out. Quand on sait que la France est le 2e pays au monde en termes de burn out, il y a urgence.

Afin de réduire le volume, vous pouvez demander à ne plus recevoir de mails pour lesquels vous n’apportez rien et qui ne vous apportent aucune information nécessaire à la réalisation de vos missions. Vous pouvez également prévenir qu’ils ne seront pas lus et supprimés. Les mails restants seront ceux pour lesquels vous agirez, dans le cadre de vos missions.

 

Dans les relations professionnelles

Suivant le même principe, mieux vaut bien s’entendre, certes avec tout le monde, mais surtout pouvoir compter sur une poignée de collègues, avec lesquels l’entraide est réciproque et la confiance de mise. Ces personnes ne sont pas forcément dans votre équipe, et vous n’avez pas forcément d’affinités particulières avec elles, mais vous connaissez leur professionnalisme et leur fiabilité.

Lorsque je travaillais dans l’industrie pharmaceutique, j’interagissais souvent avec le service Achats. Passée une première phase de « dialogue de sourd » avec le responsable pour calculer un prix de revient d’un produit, je savais qu’il maitrisait parfaitement son job, et était capable de m’aider dans mes prévisionnels sur les aspects prix et logistique (« nos entrepôts ne sont pas extensibles » me disait-il). De mon côté, je traquais les fautes d’orthographe et j’étais sollicitée pour la relecture de communiqués importants, y compris par la Direction et le Service Communication.

Evidemment, il n’est pas rare de se faire des amis sur le lieu de travail, personnes que vous pourrez épauler dans des moments difficiles et qui le feront si vous en ressentez le besoin. Ici il ne s’agira pas fiabilité professionnelle mais de soutien moral, avec des personnes qui ont l’avantage de partager et comprendre votre milieu professionnel mieux que n’importe qui d’autre.

 

Dans les missions et les dossiers

Evidemment, on vous a recruté pour remplir une mission et vous devez réaliser un certain nombre de tâches pour y arriver. Dans de nombreux emplois « de bureau », il y a une part de flexibilité. Tant que le boulot est fait, bien fait et dans le temps imparti, le manager est satisfait.

Rien ne vous empêche donc d’organiser votre journée en fonction de cela. Vous n’êtes pas très à l’aise avec les chiffres et vous devez les tenir à jour toutes les semaines? Choisissez une période où votre concentration est maximale pour les traiter, plutôt que le vendredi à 16h, en pensant à ce qu’il faut glisser dans la valise pour le week-end entre amis qui vous attend.

Vous appréciez de traiter vos mails non pas au fil de l’eau mais 2 à 3 fois par jour. Prévenez vos interlocuteurs, et restez joignable par téléphone (par plages aussi, éventuellement) en cas d’urgence.

On vous sollicite pour intervenir sur un projet qui n’est pas de votre ressort ? Au-delà de la flatterie à être sollicitée, posez-vous les bonnes questions avant d’accepter, vous pourriez le regretter.

 

Dans les réunions

A raison de plus de 3 heures par semaine, on ne s’en rend pas vraiment compte, mais un cadre passe en moyenne 27 jours par an en réunion. (Sondage IFOP) Plus d’un mois. Plus que la durée de ses vacances. Et ce n’est qu’une moyenne, certains y passent 3 heures par jour.

Dans plus de la moitié des cas, votre présence n’est pas indispensable à la réunion à laquelle vous êtes convié, et vous y assistez (plus que vous ne participez activement à cette réunion) tout en faisant autre chose, au cas où, durant l’heure de réunion, une information de 30 secondes vous concerne. Afin de gagner en efficacité, ces réunions devraient être repensées : seuls les indispensables y participent, et un compte rendu est envoyé à ceux qui ont besoin de l’information pour agir par la suite.

 

#3 – (Re)mettre du sens

C’est THE sujet des 5 dernières années qui agite le monde du travail. On n’y échappe pas, et ce que l’on soit ouvrier à la chaîne, directeur(rice) marketing dans l’industrie agro-alimentaire, ou développeur(se) dans une start-up.

Pourquoi et pour quoi fait-on ce métier ? Votre employeur peut avoir des valeurs fortes et les incarner au quotidien, et si ce sens ne vous saute pas aux yeux, vous avez au moins la sensation d’appartenir à un groupe partageant ces valeurs et travaillant à les honorer.

Si votre « boîte » n’est pas dans cet état d’esprit, et que vous avez plutôt l’impression d’être un pion, disponible et disposé à remplir des missions contre un salaire, corvéable et remplaçable, cela ne signifie pas pour autant que votre boulot n’a aucun sens. Simplement vous devrez trouver ce sens par vous-même, accepter de regarder au-delà des missions du quotidien, identifier vos valeurs professionnelles et vérifier comment vous les honorez dans votre travail.

Je ne sais pas si cet exemple est réel ou non mais j’ai lu à plusieurs reprises, une anecdote sur la conquête spatiale des années 60 aux Etats-Unis. Un jour, quelqu’un demanda à un technicien qui faisait le ménage dans des locaux de la NASA ce qu’il faisait, et ce dernier répondit : « Je mets un homme sur la Lune ». Evidemment, il ne faisait pas les calculs, ne construisait rien, mais il permettait à tous ceux qui œuvraient concrètement à ce grand projet d’avoir des locaux de travail propres et agréables, propices à la réflexion.

En revanche, j’ai un autre exemple, bien réel. Celui de mon père, dont le métier était difficile et peu valorisé. Il entretenait et réparait les compacteurs de déchets pour une grande entreprise. Il intervenait dans la grande distribution, les déchèteries, les centres commerciaux … Rien de sexy. Un jour que nous discutions de son métier après un lumbago, (je devais avoir 16 ou 17 ans) je lui demandais pourquoi il n’en changeait pas. Il me répondit que l’un de ses clients était l’hôpital Necker à Paris. Contribuer, à son petit niveau, à la qualité des soins donnés aux enfants malades, lui apportait fierté et satisfaction. Pour ces gamins malades, il oubliait la pénibilité d’une journée de travail le dos dans la neige, l’odeur nauséabonde, devoir déblayer tout le compacteur pour accéder à la partie qui ne fonctionnait plus. Ce métier était très pénible, mais finalement, ne le préoccupait pas en dehors des heures de travail, lui permettait de profiter pleinement de son temps libre et même de développer en parallèle une petite entreprise artisanale avec son épouse. Cela lui convenait parfaitement et n’enviait pas les managers qui passaient leur temps en réunion ou derrière un ordinateur.

 

#4 – Cultiver ses talents

L’être humain a besoin de progresser, apprendre, transmettre pour s’épanouir. Dans le monde de l’entreprise, cela se traduit par de la formation, entre autres. Votre employeur a certes une obligation légale de former ses employés, mais parfois, les formations proposées ne sont pas celles auxquelles vous aspirez. Qu’à cela ne tienne, vous pouvez toujours vous inscrire à des MOOCs, acheter un livre, utiliser votre CPF sur un sujet précis qui vous aiderait dans vos missions au quotidien.

Parfois l’entreprise veut bien faire, mais ne répond pas aux besoins de ses employés. Je me souviens de l’un de mes employeurs, qui avait payé une formation de 3 jours à la communication non violente à ses nouveaux cadres. Sur 12 participants, 3 s’en fichaient royalement et 2 sont ressortis en disant « foutaise ce truc ». Les autres avaient retenu l’aspect technique et ont passé les semaines suivantes à réfléchir littéralement (on pouvait sentir les neurones chauffer) avant toute prise de parole.

Si une compétence vous semble pertinente pour votre pratique professionnelle (mais pas seulement), n’attendez pas que votre employeur vous le propose, car cela pourrait ne jamais arriver (cf le 1. de cet article)

 

# 5 – Se dire que « tout est expérience »

Vous devez penser que c’est plus facile à dire qu’à faire. Et je vous comprends. En effet, lorsque vous êtes sous pression, le « nez dans le guidon », difficile de penser que ce que vous vivez sur le moment peut vous être utile pour plus tard. Pourtant changer son état d’esprit par rapport à une situation vécue comme difficile revêt de nombreux avantages :

  • Vous vous projetez au-delà de cette situation, et vous vous mettez inconsciemment en action pour y arriver plus vite et de manière efficace.
  • Vous identifiez ce qui vous pèse particulièrement et cela devient un critère pour un futur emploi ou une future mission que l’on voudrait vous confier. Par exemple, vous n’accepterez plus de poste itinérant à plus de 20%, car votre famille vous manque trop.
  • Vous ne vous blâmez pas pour ce qui se produit, vous supportez la contrainte car vous la savez temporaire. Si une situation similaire représente, vous saurez quelle attitude adopter (ou du moins vous adopterze une attitude différente) pour que ce ne soit plus une contrainte, voire que cela se transforme en opportunité.

 

Conclusion

La QVT n’est pas un gros mot, et encore moins une « usine à gaz » à mettre en place pour les salariés d’une entreprise. Il appartient à chacun d’améliorer, à son échelle et sans enfreindre le règlement intérieur de l’entreprise, son propre bien-être au travail. De très nombreuses entreprises y sont sensibles mais n’y œuvrent pas encore. Si chacun est le petit colibri, cela pourrait donner des idées un peu plus haut dans la hiérarchie. Et si ce n’est pas le cas, est-ce important ? Du moment que vous vous sentez bien, ou en tout cas mieux en opérant quelques petits changements dans votre quotidien professionnel.